LES
SOUFFRANCES DES POPULATIONS DANS LES ARRIERES
Tout le sud de notre Meuse est pratiquement inclus dans la zone des Arrières. La région connaît une activité militaire intense tout au long de la guerre, mais avec des paroxysmes : en septembre 1914 (bataille de la Marne), en 1916 (bataille de Verdun), en 1918(préparation des deux grandes offensives américaines).
Ies servitudes sont nombreuses pour la population : hébergement d'effectifs importants' de chevaux (unités à l'instruction, au repos), implantation de services divers (ravitaillements, stocks de matériels, de santé...).
Il en résulte un va et vient incessant de colonnes à pied, de convois, et pour les civils, non seulement une gêne mais des restrictions à la liberté de circulation motivée par des raisons de sécurité (carte de circulation en zone des Armées) et aussi de grandes difficultés de ravitaillement.
A ces servitudes militaires, s'ajoute la présence de nombreux réfugiés (du nord meusien surtout). Villes et villages sont "pleins à craquer"... Objectifs tout désignés pour l'ennemi aérien (avions, zeppelins...) voire pour l'artillerie à longue portée.
De toutes ces difficultés l'enseignement scolaire souffre naturellement...
Nous
nous limitons ci-après aux vicissitudes de quelques unes de nos cités.
VERDUN
Dès 1914, 6 200 personnes sont évacuées. Un millier d'entre elles dirigées sur NOYON, SOISSONS, COMPIEGNE, sont rapidement mêlées aux combats de la bataille de la Marne ! En septembre, il ne reste plus que 4 500 habitants à Verdun.
En juin 1915, la ville est l'objet de tirs de l'artillerie lourde à longue portée (380) et subit d'importants dégâts. Il s'ensuit un second exode.
En février 1916, quelques jours avant le déclenchement de l'offensive allemande, de nouvelles évacuations sont prescrites par l'autorité militaire à Verdun dans les villages voisins.
Et le 21 février, quelque 1 200 Verdunois, les derniers habitants, s'enfuient sous les obus, dans la neige, vers Nixéville.
Eveque, conseil municipal, fonctionnaires, se replient alors sur Bar-leDuc, quelques uns sur Paris. Il ne reste plus à Verdun que les agents de police et les pompiers.
Dans les jours qui suivent la ville est écrasée par des milliers d'obus souvent de gros calibre dont les objectifs essentiels sont les ponts et la citadelle... provoquant de très importantes destructions.
Le 3 avril 1916, le bâtiment X de la place d'Isly est atteint par des obus incendiaires. 372 soldats, des territoriaux, y perdent la vie, carbonisés, n'ayant pu s'échapper par les fenêtres protégées par des barreaux.
Verdun qui a tant souffert, est la ville la plus décorée de France : Légion d'Honneur, Croix de Guerre, de nombreuses distinctions étrangères... Son "aura" dépasse celle de toutes les autres villes de France et sans doute du Monde !... Mais d'autres cités ont également souffert certes à des degrés moindres...
Notre
chef lieu joue tout au long de la guerre un rôle logistique important. C'est
une plaque tournante pour l'acheminement vers le front des combattants, des
ravitaillements ou des matériels, un centre hospitalier, plus particulièrement
en 1916. Au "Varinoit , très insuffisant, s'ajoute une noria
ininterrompue (jusqu'à 6 000 véhicules par jour) sur la Voie Sacrée
entretenue jour et nuit par les Territoriaux.
Le centre hospitalier compte jusqu'à 5 000 lits. S'y dévouent de nombreuses dames volontaires et maintes oeuvres charitables.
Un cimetière militaire est créé où on peut dénombrer à la fin de la guerre près de 5 000 tombes.
L'importance de Bar-le-Duc sur le plan de la logistique lui vaut naturellement d'être l'objectif de bombardements aériens. Au cours d'une douzaine d'attaques, la ville reçoit environ 600 bombes ou "torpilles" qui causent quelques 300 victimes. Les attaques les plus meurtrières sont celles de juin, septembre et octobre 1916.
A la fin de la guerre on compte également 700 enfants de Bar-le-Duc tombés au Champ d'Honneur.
De
ces souffrances reconnues, Raymond Poincaré, Président de la République fait
état le 13 août 1919 lorsqu'il est reçu à l'Hôtel de Ville par le Maire, le
Docteur Moulin. Et André Maginot les souligne, en remettant la Croix de Guerre
à la ville, le 14 novembre de la même année.
COMMERCY
Ville de garnison importante avant 1914 (deux régiments : le 155e RI et le 4e Régiment de dragons arrivé de Chambéry en 1913), elle est un noeud de communication essentiel sur la voie ferrée Paris-Avricourt. De nombreuses unités y transitent destinées au front de Saint-Mihiel ou en provenant. C'est surtout un centre hospitalier indispensable.
Dès le 29 août, une péniche apponte à l'écluse de la Forge (écluse 4) chargée de blessés français de la bataille de Morhange.
En
septembre l'ennemi attaque à Saint-Mihiel. Les blessés affluent à Commercy
transportés sur des chariots de culture, couchés sur de la paille.... Les plus
gravement atteints sont traités sur place. Les autres attendent leur évacuation
vers l'extérieur dans les locaux de la "Petite vitesse".
Trois
hôpitaux vont fonctionner :
H 28 : hopital de la Croix Rouge aménagé dans les locaux de l'Ecole St-Léon dite "des Frères",
H 108 : organisé par les Dames de France est installé à l'Ecole Supérieure de jeunes filles,
Hôpital Saint-Charles, rue Carnot (soeurs de St-Charles).
La ville est soumise à de nombreux bombardements d'artillerie, et à quelques bombardements aériens (sur la nature desquels les témoins ne sont pas d'accord : ceux de juillet et août 1918 paraissent cependant indiscutables).
Selon des statistiques locales, à première vue sérieuses, la ville aurait
subi 34 bombardements et 633 projectiles(obus ou bombes) l'auraient atteinte,
causant 12 tués et 30 blessés dans la population, détruisant 25 maisons et en
endommageant 36.
REVIGNY
Le 6 septembre 1914, à l'arrivée des envahisseurs, il ne reste qu'une soixantaine d'habitants dans la ville (sur 1950). Bombardée par les Allemands, puis par les Français, elle est délibérément pillée et incendiée par l'ennemi... Lorsque celui ci se replie le 11 septembre, près de deux cents maisons sont détruites ou gravement endommagées.
Dans
l'église classée monument historique, il ne reste que les murs et une partie
de la voûte. La mairie avec toutes ses archives est détruite. Le Maire est maître
Gaxotte père de l'Académicien Pierre Gaxotte.
Revigny est en zone d'Armées un centre ferroviaire de grande importance permettant l'acheminement des troupes et des ravitaillements sur Verdon, particulièrement en 1916, et pour l'acheminement des permissionnaires d'un vaste secteur du front. Sa gare est à l'intersection de la grande ligne Paris-Avricourt et des voies secondaires menant à Saint-Dizier et Vouziers,.. Elle est équipée de quais militaires....
C'est comme à Bar-le-Duc et Commercy un centre hospitalier important de tri et de soins : trois hôpitaux y fonctionnent et triste corollaire, un cimetière militaire (2 664 tombes en 1918).
A partir de 1917, on aménage dans le voisinage plusieurs terrains d'aviation dont celui de RANCOURT à partir duquel opère la célèbre escadrille des Cigognes de Guynemer.
Tout
ceci vaut à Revigny de nombreux bombardements par avions et zeppelins.
Le
27 février 1916,
trois civils sont tués. Ce jour là, la 17e Section d'auto canons abat
un zeppelin dont les bombes éclatent au sol créant de nombreux entonnoirs.
Le
07 mars 1916,
un train de munitions est attaqué.
Le
22 juin 1916,
de nombreux soldats sont tués ou blessés.
Le
16 février 1917,
un dépôt de munitions explose non loin de l'usine où on les fabriquait.
Les 30 septembre, ler et 2 octobre 1917, la ville est bombardée par torpilles. Il y a de nombreux tués et blessés parmi civils et militaires. Les derniers bombardements ont lieu en juillet 1918. En septembre 1917, l'explosion d'un dépôt d'obus à gaz allemands non éclatés et regroupés à Revigny, provoque une chaude alerte. Des masques fournis par un escadron de hussards sont distribués en catastrophe à la population, totalement dépourvue de moyens de protection...
Au
total, Revigny déplore, compte non tenu des nombreux militaires décédés dans
les hôpitaux :8 civils tués,4 otages disparus,69 tués au Champ d'Honneur.
En avril 1919,
Poincaré remet la Légion d'Honneur au Maire et au Chanoine Halbin et la Croix
de Guerre à une jeune infirmière de la ville.
Le 21 avril 1920, André Maginot remet la Croix de Guerre à la ville
DEPORTATION DES POPULATIONS MEUSIENNES
FLABAS ( village à 300m lisière du BOIS des CAURES et 4 km du front)
La Meuse vient en second rang, quant au pourcentage des déportations, tant il est vrai que ce département ne fut que partiellement envahi, sans quoi et sans aucun doute, il eût reçu la palme de la quantité.
Deux catégories furent créées: D'un côté, les hommes en âge de porter les armes qui, en général, furent internés pendant toute la durée de la guerre et, par ailleurs ,les bouches inutiles (femmes, enfants et vieillards), lesquels firent connaissance avec le camp de Amberg et ensuite Rastatt avant leur départ pour le rapatriement.
Deux régions furent touchées particulièrement: D'une part la Woëvre, à 100 % et, d'autre part, la région au nord de Verdun, en résumé toute la région Nord Est de Verdun fut déportée.
Ainsi nous citerons les cantons de Montmédy, Stenay, Montfaucon, Dun sur Meuse, Damvillers, Flabas, Spincourt; puis, descendant vers les côtes de la Meuse et de la Woëvre, ceux de Etain, Fresnes en Woëvre, Vigneulles les Hattonchatel et Apremont la Forêt.
Toutes les communes de ces chefs lieux furent raflées et leurs populations emmenées en Allemagne.
D'après les chiffres officiels, on estime à trente mille le nombre des déportés Meusiens. Près de trois mille sont décédés dans les camps ou en cours de route ou immédiatement aussitôt leur rapatriement.
LA WOEVRE
Nous insisterons spécialement sur les souffrances de la région dite de la Woëvre qui fut touchée totalement par ces déportations: Hannonville, Herbeuville, Combres, Dommartin, Champlon, Marchéville, Saint Hilaire, Maizeray, Saulx en Woëvre, etc...
Le 20 octobre; à 7 heures du matin, la population tout entière recevait l'ordre de se rassembler immédiatement avec bagages à mains uniquement . Il fallait voir ces familles entières, ces vieillards, ces enfants en bas âge quittant, le cœur serré, leurs foyers, leurs champs, leurs vignes, leur bétail, enfin tout ce à quoi des familles rurales sont attachées, pour partir vers l'inconnu, sous les hurlements des casques pointus et les cris gutturaux de la soldatesque.
Encadrés baïonnette au canon, les convois lamentables s'acheminaient sur la route de Conflans, à pied, les mamans portant leurs bébés, traînant par la main les plus grands, ployant sous le poids de ce qu'elles avaient pu emmener.
Quelques chariots avaient été prévus pour les vieillards et les infirmes et ce fut l'embarquement, en gare de Conflans Jarny.Wagons à bestiaux, 56 dans chaque wagon et une sentinelle postée en travers la porte à glissière et en route pour I'inconnu. Après 48 heures de trajet, ce fut 1'arrivée au camp de Amberg, en Bavière. Quelle arrivée !... Les familles furent parquées dans des sortes de hangars, pêle-mêle, où rien n'avait été prévu. Couchés à même le sol, les déportés endurèrent ce régime durant un mois, jusqu'au moment où des baraques avec couchettes furent organisées. Et deux mois après, ce fut le départ pour la forteresse de Rastadt.
Là, le régime fut des plus inhumains et heureusement il fut limité à une dizaine de jours, car aucune femme, aucun enfant, aucun vieillard n'eût survécu.
Rastadt, les casemates de la forteresse ont laissé parmi les déportés le plus pénible souvenir. Nous laissons la parole à une déportée, Madame Marie Louise ALLEAUME, de Nancy, présidente de la section Meuse de l'Amicale Nationale:
"Je revois encore ce mot en français Bastion et ce chiffre: XII. Le bastion XII. Derrière cette porte s'ouvrait le chemin de notre calvaire, très heureusement écourté... Rastatt, cité calme et silencieuse, aux avenues sans boutiques, remplies de villas coquettes et de jardins... Mais nous, nous étions dans le fort. Représentez vous, au fond d'un couloir, une casemate sombre, avec une petite fenêtre grillée et armée d'énormes barreaux. Au mur, des planchettes superposées, et dans ce réduit plus de 150 personnes. Impossible même de respirer. Mais ce n'était rien, nous allions prendre contact avec une vermine grouillante, au point que nous préférâmes coucher ou plutôt nous recroqueviller à même le ciment du sol. Je tentai d'ouvrir la petite fenêtre grillagée; impossible, elle était rouillée par les temps. Notre Zimmer puait le moisi, l'humidité, le rance et nous continuions à éviter les couchettes remplies de poux et de puces. Nous n'aurions pu résister longtemps à ce régime. Mais fort heureusement, une dizaine de jours après notre arrivée en ce lieu infect, nous étions rapatriés par la Suisse."
Il est inutile d'ajouter que la plupart des enfants en bas age sont décédés, tant au cours de la déportation que pendant le séjour dans ces camps. De même de nombreux vieillards n'ont pu résister à ce régime. Prenons, à tout hasard, le village de Hannonville sous les Côtes: 32 déportés sont restés dans les cimetières allemands. Et chaque localité meusienne a payé un tribut identique à ces déportations inhumaines qui, heureusement, ont pris fin dès février 1915, pour la plupart des femmes, des enfants et des personnes âgées.
La
Meuse fut le témoin de quelques faits dont furent les victimes certains
Meusiens:
LAGNEVILLE
Le
23 septembre, MM. WOIMBEE et FORTIN, de Lavignéville, respectivement âgés de
61 et 65 ans, étaient arrêtés sous le faux prétexte qu'ils étaient des
francs tireurs. Or, M. Woimbee avait un pied cassé depuis quelque temps et
Fortin, atteint de rhumatismes aigus, ne pouvait marcher. Fortin fut attaché à
une corde tenue par deux cavaliers et dut suivre le pas des chevaux, hurlant de
douleur. Tombant à tout instant, il était relevé à coups de lance. Couvert
de sang, il suppliait les soldats de l'achever. Finalement, Woimbee, aussi mal
en point, le prit dans ses bras, pour tenter de le porter, geste qui, tout de même
attendrit les soldats, lesquels transportèrent ces deux invalides jusque Saint
Maurice sous les Côtes proche.
Arrivés
là, les Allemands firent entrer ces deux septuagénaires dans une maison et les
forcèrent à se tenir debout, les bras en croix,
face au mur et ils chargèrent leurs culasses
pour
faire le simulacre de les
fusiller. Enfin, ils abandonnèrent
ces deux hommes demi morts de faim, de souffrances et de frayeur.
FLABAS
Un autre village fut particulièrement touché Flabas ( village d'adoption de mes grands-parents paternels italiens-mon grand père GAOD Giovanni était médaillé unité d'Italie campagne 1915-1918)
Arrivant dans ce village, le 27 AOUT1914, les allemands commencèrent à piller les maisons évacuées, sans toucher aux autres. Ils promirent même aux habitants qui restaient que leur mobilier serait respecté ; ce qui ne les empêche pas, deux jours après, d'enlever 50 bêtes à cornes, des veaux, des porcs et de la volaille.
Le ler septembre, Flabas fut bombardé ; plusieurs maisons furent atteintes, dont le presbytère qui fut en grande partie démoli.
Le 6 Septembre, Messieurs BLANCHARD, maire, PERIGNON,SCHEWINN, Pol LECOMTE et STROFF furent arrêtés comme franc tireurs, menacés d'être fusillés, et enfin conduits à CREPION. De ce jour jusqu'au 18, continua le pillage des maisons abandonnées ; absolument rien n'y fut laissé : literie, linge, habillement, et même les portes de granges, les boiseries, les volets, les planchers, tout fut enlevé. Ce qui ne pouvait leur servir était brisé sur place.
Le
14, recommença le bombardement, qui dura jusqu'au 18. La population se réfugia
dans les caves.
Le 17, des bombes incendiaires détruisirent complètement 11 maisons.
Le 18, à 11 h du matin, 36 personnes : Mme PERIGNON, ses deux filles et ses deux petits enfants ; M. et Mme LECOMTE HARDI ; Mne LECOMTE TROUSLARD ; Mme BLANCHARD JACQUES, femme du maire ; Mme MINARD ; M. Adolphe HUSSENET ; Mme LECOMTE COLLIGNON ; Mme SCHEWINN et ses deux enfants ; Mme Esther LECOMTE ; M. et Mme Victor HUSSENET ; Mme LECOMTE COLLIGNON ; Mme Vve RENAUD ; M. et Mme Victor JACQUE ; Mme BLANCHARD LAURENT ; Mme LAVIGNE ; M. et Mme PONCET ; Mme VERY, sa fille et sa petite fille ; Mme GUIOT et ses deux enfants ; M. et Mme BURTAUX et leur fille ; Mme PARROY et M. Edouard HENRION, furent enlevés, sans qu'il leur fut permis d'enlever quoi que ce soit.
M. Hubert BLANCHARD, qui se trouvait dans les champs, et M. Jean-François HENRION, paralytique, ne furent pas emmenés le même jour ; leur tour ne vint que la semaine suivante ; ils quittèrent Flabas, avec Monsieur LECOMTE de MOIREY. Les barbares contraignirent M. BLANCHARD à gagner LONGUYON à pieds et en sabots ; quant à Monsieur HENRION, qui ne pouvait marcher, ils le conduisirent en brouette. Ces deux malheureux succombèrent dès leur arrivée au camp.
Sous une grêle d'obus, les 36 otages furent d'abord conduits à WAVRILLE, où ils retrouvèrent les cinq hommes arrêtés le 6 ; de là, ils allèrent à PEUVILLERS, où l'église leur servit de dortoir. Le lendemain, par une pluie battante, ils arrivèrent à PILLON, complètement détruit et incendié ; ils y couchèrent tout mouillés dans une grange, sur de la paille qui avait déjà servi de litière aux animaux. Enfin, le 20, ils atteignirent LONGUYON ; ils n'avaient reçu aucune nourriture depuis leur départ de Flabas, c’est à dire depuis 48 heures
A Longuyon, ils montèrent dans des wagons à bestiaux, et mirent deux jours et deux nuits pour gagner GRAFEWOEHR ; quelques morceaux de pain noir furent leur seul aliment pendant tout le voyage.
A GRAFENWOEHR, ils furent enfermés, les hommes séparés des femmes, dans des écuries à chevaux, garnies de litière usagée, et sans appareil de chauffage. Ils y restèrent six semaines sans que leur litière fut changée, et avec une couverture pour trois personnes. La nourriture était si mauvaise qu'ils ne pouvaient s'y accoutumer, et que la crainte de mourir de faim était la seule raison qui pouvait leur faire accepter ce régime.
Au bout de six semaines, ils furent logés dans des baraques garnies de paillasses et chauffées, quoique percimonieusement. C'était une amélioration, mais qui ne s'étendait pas à la nourriture. Celle ci, au contraire, diminuait de jour en jour en quantité ; elle ne pouvait le faire en qualité.
Le 30 JANVIER, les otages de Flabas quittèrent ce camp, pour RASTADT, où ils restèrent dix jours ; ils y furent encore plus malheureux, si c'est possible ; ils étaient logés dans les fortifications : c'est tout dire.
Enfin
ils furent rapatriés et répartis dans divers villages de l'Isère et des
autres départements. Sont restés prisonniers : MM. BLANCHARD, maire ; SCHEWINN,
STROFF, Pol LECOMTE et Adolphe HUSSENET ; sont morts pendant leur internement :
MM. Victor JACQUE, LECOMTE HARDI, Victor HUSSENET, et Mme SCHEWINN. De plus,
sont décédés depuis leur retour en France : Mme PARROY, 46 ans ; et Mme
JACQUE, 80 ans, belle mère du maire.